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Lecture hypertextuelle

Posted by Ludovic Gavignet on 10:45 in
Du volumen au codex, du codex à Internet

Le passage de l’écrit en rouleau à l’écrit en cahier a constitué une évolution majeure. Aujourd’hui, hormis quelques amoureux de l’histoire du livre et de l’écrit, qui prétendrait un retour au volumen, cet écrit en rouleau que l’on roule et déroule à souhait ? « Le cahier est beaucoup plus pratique ». Pourtant Internet marque le retour au volumen. Plus exactement, une hybridation du volumen et du codex. C’est tout là l’objet de mon propos.

1) Les 3 dimensions de la lecture

Lorsque l’on surfe sur le web, on peut accéder à des sites web (usage le plus répandu). Ces sites sont constitués en page. Aussi, pour pouvoir lire un texte en entier, il suffit de cliquer sur l’ « ascenseur », à droite de votre écran. Il s’agit là d’une lecture en rouleau, comme auparavant sur le volumen. Toutefois, cette lecture verticale est souvent couplée à un lien, qui à l’identique d’un livre, vous renvoie sur une autre page : la lecture en cahier (ou horizontale), comme aujourd’hui avec les livres notamment. Il y a aussi souvent une multitude de liens hypertextes. Là, la lecture est transversale. Alors je parle des 3 dimensions de la lecture sur Internet que je nommerais le principe « VHT » pour « Verticale – Horizontale – Transversale ». Je nomme « principe » et non pas règle ou loi, car ces 3 dimensions ne sont pas forcément réunies, bien que ce soit souvent le cas.

2) Outil hybride = Lecture hybride ?

Nos modes de lecture ont-ils pour autant changé sur Internet ? Sûrement.

- Les liens hypertexte : En effet, qui ne lit pas en cliquant sur les liens dès que ceux-ci sont susceptibles de l’intéresser. Toutefois ces choix étaient déjà possibles avec un livre et sa table des matières par exemple. Ce qui change avec Internet, c’est que chaque mot constitue un lien, un nœud vers d’autres pages, d’autres sites, des ailleurs en somme.

- La lecture rapide : Avec Internet, la lecture est rendue moins agréable, le zapping (pour reprendre un terme à la mode) en est d’autant plus accrû. Ainsi, la lecture sur Internet est bien souvent une lecture « rapide » mais malheureusement bien souvent inefficace. Mais la lecture rapide existait déjà me direz-vous ? Oui. Mais avec Internet, cette tendance s’est accrûe. Comparez-vous en train de lire un livre sur support physique avec le même livre sur support virtuel. Vous constaterez vite que vous passerez plus de temps à lire le livre physique que le livre virtuel. Les raisons sont nombreuses : les liens hypertexte qui vous détournent de votre lecture principale, une situation inconfortable de lecture, …

3) Un nouveau rapport à l’écrit ?

Le couplage des 3 dimensions de lecture engendre un autre mode de lecture. Le lecteur construit lui-même son parcours de lecture, sautant d’un lien à un autre, d’un sujet à un autre, d’un thème à un autre. Cette lecture est donc illimitée, infinie.

- Relation auteur-lecteur : Cette relation s’établit comme un contrat implicite où le lecteur attend quelque chose de l’auteur (surprises, idées, …). Avec Internet, cette relation devient vaine puisqu’il y a une multitude d’auteurs dans notre lecture. Cela complique donc d’autant plus le travail de synthèse de l’information. Les auteurs n’ont pas la même qualité et il est difficile de retrouver l’auteur d’une idée si l’on n’a pas noté les références !

- Le pouvoir du lecteur : Le lecteur ressent comme un pouvoir à sélectionner rapidement l’information, à zapper ce qui ne lui convient pas, à changer instantanément de source, … Alors qu’avec le livre physique le lecteur est otage volontaire, avec l’écrit virtuel le lecteur est libre malgré lui. Cette sensation de pouvoir altère alors celle de plaisir. Le plaisir de s’emprisonner dans un livre et de ne pouvoir en sortir. Avec Internet, le lecteur, libre, est perdu, ne sait par lui-même efficacement se guider. Vous l’aurez compris ce pouvoir altère bien souvent le plaisir de lire

Le passage à la 3ème dimension de la lecture, rendu possible par Internet, modifie les modes de lecture. La lecture plaisir laisse place à une lecture libre. Aussi, le livre physique a-t-il encore de beaux jours devant lui : le plaisir de lire un livre physique, avec toutes les « contraintes » qui en font son attrait, risque de ne jamais disparaître au profit d’une lecture virtuelle. C’est plutôt la complémentarité de ces deux types de lecture qu’il convient d’étudier.

« Alors que les écrits paraissent et restent, les écrits d’écran apparaissent et disparaissent »


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